Les œufs de Pâques
Si la Semaine sainte est le temps de la récolte des œufs à l’état
de nature, le lundi de Pâques est le jour de la récolte
des œufs teints, appelés roulées.
L’emploi que l’on fait des œufs à l’occasion
de Pâques paraît avoir une
origine théogonique. Chez la plupart
des anciens peuples, l’œuf était
considéré comme un symbole
de l’éternité et
de la fécondité. C’était
un usage commune à tous les peuples
agricoles d’Europe et d’Asie,
dit le savant mythologue Court de Gébelin,
de célébrer la fête
du nouvel An en mangeant des œufs.
On avait même soin de les teindre
en plusieurs couleurs, surtout en rouge,
couleur favorite des anciens peuples
et des Celtes en particulier. Mais la
fête du nouvel an se célébrait à l’équinoxe
du printemps – (sous la première
race, l’année commençait
le 1er mars, jour de la revue de toutes
les troupes au Champ-de-Mars ; sous
la deuxième race, à Noël,
puis à l’Annonciation (25
mars) ; sous la troisième
race, à la veille de Pâques ;
enfin, en 1564, un Édit de Charles
IX fixa définitivement l’ouverture
de l’année au 1er janvier) – c’est à dire
au temps où les chrétiens
ne célèbrent plus que la
fête de Pâques, tandis qu’ils
ont transporté le nouvel an au
solstice d’hiver. Il est arrivé de
là que la fête des œufs
a été attachée chez
eux à la Pâque. Cependant,
ce n’a point été par
le simple fait de l’habitude, mais
par la raison qui faisait attribuer à la
fête de Pâques les mêmes
prérogatives qu’au nouvel
an, celles d’être un renouvellement
de toutes choses, comme chez les Persans,
et celles d’être, d’abord
le triomphe du soleil physique, et ensuite
celui du soleil de justice, du Sauveur
du monde, sur la mort, par la résurrection.
Les roulées viennent de l’usage
qui est fait de ces œufs dans un
jeu jadis très répandu.
On faisait rouler, sur un plan incliné,
des œufs qui, avant de s’arrêter,
devaient s’entrechoquer avec d’autres
placés au repos et servant de
but.
En certains endroits, comme dans les
communes de Quarré les Tombes,
enfants et mêmes grandes personnes
jouaient, à la toquette avec des
roulées. L’un des joueurs
présentait à l’autre
l’extrémité d’un œuf
enveloppé le plus possible par
la main. L’adversaire devait frapper
son œuf du même bout. L’œuf
cassé était acquis au partenaire
dont l’œuf avait résisté au
choc.
Source : Les usages,
croyances, traditions, superstitions
de l’Yonne
(Charles Moiset 1888)
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