Jean Baptiste MUARD
Né à Vireaux en 1809 de Claude MUARD, scieur
de long, marchand de bois, et de Catherine PAILLOT (née à Vireaux,
fille de vigneron et petite fille du recteur de l’école
de Poilly sur Serein).
Décédé à La Pierre qui Vire
le 19 Juin 1854.
Fondateur de la Pierre qui Vire.
Il entre en février 1820 à l’école
presbytérale de l’abbé Rolley, puis
au Petit Séminaire d’Auxerre en septembre
1823. Il reçoit la tonsure le 11 Juin 1831, manifeste
déjà une foi ardente et pose « pour
le fondement de sa vie » : l’humilité,
la modification de sa volonté propre, l’esprit
de pénitence, la pureté d’intention,
l’union avec Jésus et Marie, tout cela pour
arriver à l’amour qui est la fin de toute
la Loi . A l’école, ses succès
sont éclatants, il est « l’élève
décoratif ». En mai 1830, il est chargé de
l’adresse solennelle à Monseigneur le duc
d’Angoulême : il a le premier prix de
vers latins sur le thème : la prise d’Alger. En
1833, il est sous-diacre en avril, diacre en décembre,
maître d’étude au Grand Séminaire.
Ordonné prêtre le 24 Juin 1834, il décide
de faire une retraite dans une Maison de piété,
puis est nommé desservant de Joux la Ville du 17
Juin 1834 au 11 mai 1838, qu’il quitte épuisé.
Curé de campagne classique, avec des paroissiens,
querelles municipales, espoirs et déceptions apostoliques, école
presbytérale (2 élèves) sans oublier
un potager à entretenir et les inévitables
emprunts pour s’installer. Rêvant de devenir
missionnaire, il va consulter à Paris le supérieur
des Missions étrangères sur la possibilité d’être
admis dans son institut, ce qui est sans espoir puisque
l’archevêque ne donnerait pas son agrément.
Contre son gré il est transféré à Saint
Martin d ‘Avallon. En quelques mois, il remplit
son église à chacun de ses sermons. Le vendredi
13 Décembre 1839, il vit une expérience mystique
extraordinaire qu’on appellera La Vision d’Avallon,
qui confirme sa vocation, car il y voit la manifestation
de Dieu à son égard. Dès 1840, il
commence ses recherches en vue d’organiser un groupe
de prêtres consacrés aux Missions dans le
diocèse. Il va à Lyon avec l’abbé Bravard,
premier collaborateur que lui donne l’archevêque
de Sens. D ‘octobre 1840 à mai 1841 ;
stage de prédicateur chez les Maristes, rencontre
du curé d’Ars, pèlerinage à Rome,
retraite chez les Jésuites de la Louvesc, retour à Sens,
début des missions diocésaines, en 1841,
acquisition et classement de ce qui subsiste de l’abbaye
de Pontigny, où s’installent en juillet 1893
les quatre premiers missionnaires diocésains, dès
lors appelés « Prêtres auxiliaires »,
d’où sortira la Congrégation de Saint-Edme.
Bientôt libéré de sa cure avallonnaise,
il s’applique à recruter des collaborateurs
et à vaincre les hésitations tant épiscopales
qu’administratives. Il entre en conflit avec Bravard
qui voudrait faire de Pontigny un complexe pastoral important
avec école et centre de retraite, Muard ne veut
ni école ni maison d’exercices spirituels,
Bravard se retire (avril 1844). A monseigneur Mellon Jolly,
Muard demande de retirer aux prêtres auxiliaires
les paroisses à eux confiées de Pontigny
et de Venouse, afin qu’ils soient totalement disponibles
pour les missions et pour vivre en véritables religieux
(25 février 1844).
En 1845, il exprime l’idée d’une toute
autre fondation, d’un ordre monastique (vie de pénitence
et de prière dans un « désert »)
composé de trois sortes de personnes : les
unes consacrées à la vie contemplative, les
autres à l’étude et à la prédication ,
les derniers comme frères aux travaux des mains
(Lettre à l’abbé Séry).
Il fait une semaine avec l’abbé Brûlée à Piffonds,
utilisant les exercices de Saint Ignace. Deux ans plus
tard il en fait une autre, mais cette fois chez les trappistes
de Sept-Fons (Allier) en Mai 1847. Il part ensuite pour
Rome avec Maurice Delalevée et Joseph Préau, à pied,
avec un sac comme bagage et fort peu d’argent, assez
seulement pour prendre le bateau à Marseille. Ils
arrivent à Rome le 3 Octobre en pleine révolution,
et sont très mal accueillis. Deux architectes français,
rencontrés sur le parvis de la Minerve, leur conseillent
d’aller à Subiaco. Ils restent quatre mois
au monastère de Saint-Benoît, le Sacro speco,
ou plutôt à l’ermitage de Flanello.
Muard fait la connaissance du monde bénédictin,
malgré les voeux de dom de Fazy, un français,
abbé de Subiaco. Après une visite au pape,
en fuite devant l’émeute , à Gaète,
il revient à Subiaco, d’où il gagne
Civitta-Vecchia, car, sans courrier de France, il n’a
plus d’argent et doit recourir à dom de Fazy
pour payer son retour.
Il débarque en France avec ses deux compagnons,
si pauvres et si sales qu’on hésite à reconnaître
en eux des prêtres auxiliaires du diocèse
de Sens. Ils sont cependant accueillis à Aiguebelle
sud-est de Montélimar). Il revient ensuite à Pontigny
pour en finir avec sa situation intenable de supérieur
des prêtres auxiliaires (mars 1849). Malade, il est
soigné et habillé de neuf par ses anciens
paroissiens d’Avallon, terrifiés de le voir
en si piteux état et il prend trois semaines de
repos chez l’abbé Cullin (o 1808 1888), curé de
Saint-Germain-des-Champs qui l’accompagne dans la
recherche de son « désert »,
où il veut installer le monastère dont il
rêve. Il trouve sur un plateau dominant le Trinquelin,
affluent de la Cure, un terrain que les Chastellux lui
abandonnent volontiers : la Pierre qui Vire.
Il fait deux recrues : Pierre André Moreau,
futur Père Bernard et le Frère Moreau. Il
s’installe alors au presbytère de Saint Léger
Vauban pour suivre les travaux de son établissement :
une petite cabane et un petit bâtiment en dur. Il
lui faut obtenir la permission de l’archevêque,
qui accepte, et de Rome l’autorisation de faire à Aiguebelle
un noviciat sans en devenir profès.
Lors de l’épidémie de choléra,
qui fait des ravages à Tonnerre, Ancy-le-Franc,
Coutarnoux, Massangis, il donne aussitôt l’argent
reçu pour sa fondation et rejoint les villages les
plus menacés. A son retour, il apprend qu’il
est atteint par la maladie et condamné. Il met ses
affaires en ordre et, contre toute attente, guérit.
Il part pour Aiguebelle, passe par Paray le Monial, en
pèlerinage aux Visitandines de sœur Marguerite
Marie Alacoque, dont Rome vient de reconnaître l’héroïcité (béatifiée
en 1869, canonisée en 1920).
Il se plie « avec joie » à la
règle d’Aiguebelle, qui est la réforme
la plus sévère de la règle de Saint
Benoît, à la limite des possibilités
humaines. Curieusement, les textes de dom Augustin de Lestranges,
abbé fondateur d’Aiguebelle, et du Père
Muard ne seront jamais approuvés par Rome Il
recopie le manuel des novices, dont il remanie maintes
fois les texte ; il en fait part à dom de Fazy
et le lit à dom Orsise, abbé d’Aiguebelle
et fait profit de leurs commentaires. Il en tire ses Constitutions
qu’il reverra sans cesse jusqu’à sa
mort.
Il revient dans l’Yonne le 29 Avril 1850, en passant
cette fois par La Salette, dont le sanctuaire n’est
pas encore bâti et les apparitions non encore reconnues.
Le 8 Mai, il est à Saint-Léger, bientôt
rejoint par le Père Benoît (Louis Marie Joseph
Préau) et le Père Bernard. Il fait ainsi
chaque jour 4 km pour rejoindre La Pierre qui Vire et 4
autres pour en revenir. Le Père Muard célèbre
une première messe dans une chapelle provisoire,
accompagné des curés de Saint Léger
Vauban et de Saint-Agnan le 2 Juillet, et, le 3 octobre,
la petite communauté s’engage par des vœux.
Le premier bâtiment s’achève peu à peu
(17 cellules) et les moines s’y installent. Au début
ils ne sont que cinq. Les abbés des autres monastères
commencent à s’inquiéter, le clergé devient
méfiant, les socialistes pensent « qu’il
vaudrait mieux tuer ces fanatiques ». Mais déjà leur
renommée s’étend, monseigneur Dupanloup
et Montalembert leur rendent visite. Et chantent leurs
louanges. En mars 1852, Muard organise une mission où viennent
près de 300 habitants des hameaux voisins. En 1853,
apparaissent les premiers novices. On le sollicite de tous
les côtés, jusqu’à Saint Ennemond, à la
demande de l’abbé Bravard, où il arrive
malade et prêche malgré tout (avril 1854).
Le 4 Juin il est à Pontigny, les 5, 6 et 7 à Saint-Lazare
d’Avallon, remplaçant l’archiprêtre.
Darcy, malade, du 8 au 12 à Sens, pour l’ordination
du frère Augustin, il fait des visites et conférences
le 12, à Auxerre, le 13 à Avallon, il célèbre
une messe à Saint-Lazare. Le 14, il a un violent
accès de fièvre et rentre à la Pierre-qui-Vire,
visite le chantier, distribue le travail, parle avec les
Frères, malgré la fièvre et sa fatigue.
Le 15, il préside encore le chapitre, mais avec
beaucoup de peine. Cette fois, il est gravement malade,
probablement d’une fièvre typhoïde. Il
meurt quatre jours plus tard. Les condoléances affluent
de toute la France. Une messe célébrée à Pontigny
pour lui, attire 130 prêtres et une foule considérable
Source : "biographie in Dictionnaire biographique
de Paul-Camille DUGENNE "(édition SGY)
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