L’OCCUPATION hitlérienne et
la RÉSISTANCE dans l’Yonne
La Résistance dans le canton de Quarré les
Tombes
Le rôle joué par l’Abbaye Sainte Marie
de « La Pierre qui Vire »
« Bien isolé au milieu de la forêt,
ayant une certaine autonomie vis-à-vis de l’Archevêché pétainiste
de Sens, le monastère renouant avec l’antique
coutume du droit d’asile, va servir de refuge à toutes
personnes traquées par l’occupant.
En premier lieu seront recueillis les aviateurs alliés
tombés dans la région. Ainsi, de l’avion « Lancaster » qui
s’écrase dans le Bas-Morvan le 26 février
1943, 5 périssent et sont inhumés au cimetière
de St Brisson mais deux sergents parviennent à sauter
en parachute et sont récupérés par
des paysans et amenés à l’Abbaye. Ils
sont pris en charge par le père Wulfran Jeanne qui
parlait parfaitement l’anglais. Il conduit lui-même
l’un des aviateurs à Paris, l’autre
est hébergé par l’Abbé Ferrand
archiprêtre de Saint-Lazare d’Avallon et grand
résistant comme on le sait. Ces deux aviateurs anglais
pris en charge par des réseaux purent regagner l’Angleterre
par l’Espagne.
En Juillet 1943 un officier aviateur américain
poursuivi se réfugia au monastère et occupa
un moment les fonctions de jardinier, surnommé « Roosevelt » par
les élèves de l’école abbatiale.
Conduit par le frère Firmin Cugnet, chez les religieuses
de Guipy dans la Nièvre, c’est Etienne Houroux,
garagiste, rue de Paris à Avallon, lui-même
pilote de la grande guerre, qui avec sa Juva-quatre conduisit
l’officier américain jusqu’à la
ligne de démarcation qu’il franchit clandestinement à Chalon-sur-Saône.
Et jusqu’à la Libération il en fut
ainsi.
Le 25 Août 1947 une délégation de
résistants français et alliés conduits
par l’abbé Bruni curé de Pourrain (Yonne)
et ancien déporté, remettra au père
abbé dom Fulbert Glories la médaille Franco-Britannique
en remerciements aux moines de l’abbaye de la Pierre-qui-Vire ,
d’avoir caché et « passé » des
aviateurs alliés tombés dans la région.
Les Juifs vont également bénéficier
du droit d’asile et deux d’entre eux resteront
cachés d’août 1942 à la Libération.
Enfin, le monastère va largement accueillir les
réfractaires au STO qui seront employés à la
ferme de l’abbaye située au lieu-dit « Les
Roubeaux ». Pour éviter toute surprise
en cas de perquisitions des hitlériens, ils se forment
en maquis dans une cabane construite dans les bois voisins.
En décembre 1943, ils sont une dizaine. A quelques
kilomètres de là se trouve le moulin de Ruères
qui était un rendez-vous de collaborateurs et de
dénonciateurs. Les évènements se déroulant à « La
Pierre qui Vire » ne leur échappaient
pas et c’est sans doute pourquoi, le 7 décembre
1943, l’Abbaye est investie par une centaine de soldats
hitlériens.
« Dès 7 heures du matin, témoigne
le frère Pascal Bréhault, par un brouillard
intense, toutes les issues du monastère sont bloquées,
la communauté toute entière est immobilisée
dans la salle du Chapitre tandis que les locaux conventuels
et les cellules monastiques sont fouillés systématiquement.
Une mitrailleuse est en position de tir dans un angle du
grand côté du cloître, visant l’entrée
de l’église et la porte du chapitre. Une autre
a été hissée sur le terre-plein face à l’église,
pouvant balayer toute l’entrée. Des soldats
sont postés tout autour des bâtiments… »
Le 31 décembre 1943, c’est cette fois la
ferme des Roubeaux qui est visée ainsi que les bâtiments
d’Armand Simonnot (Théo) à La Provenchère
situés non loin de là et heureusement évacués
depuis peu par les maquisards. Il ne fait plus de doute
que le Monastère a été dénoncé comme
centre actif de résistance en même temps que
le domicile de « Théo ». Cela
se voit à l’agressivité encore plus
grande des nazis qui n’ayant rien trouvé à « La
Provenchère » s’acharnent « Aux
Roubeaux ».
« Tout le personnel de la ferme a été rassemblé dans
la cuisine, dit le frère Pascal…Dehors les
jeunes gens (réfractaires au STO) sont plaqués
au mur, les mains sur la tête. Il gêle très
fort et leurs visages et leurs mains sont violacés
de froid et de peur .En tant que responsable de la
ferme, on fait descendre le frère Georges et on
le joint aux jeunes gens alignés contre le mur à l’extérieur…les
mains sur la tête. Devant eux une dizaine de soldats
allemands, mitraillette au poing. De temps en temps, un
soldat cogne l’une ou l’autre tête contre
le mur… ».
Finalement une rafale de mitraillette part blessant grièvement
un jeune réfugié parisien André Besson
qui sera transporté à l’hôpital
de Montbard où il décédera le 11 janvier
1944. Tous les autres réfractaires, ouvriers de
la ferme seront également conduits à Montbard.
Ils seront libérés sur l’intervention
du père Nicolas Perrier et rejoindront par la suite
le maquis Bernard.
Source : L’occupation hitlérienne et la résistance
dans l’Yonne (Robert BAILLY)
|