L’OCCUPATION hitlérienne et
la RÉSISTANCE dans l’Yonne
La résistance dans le canton de Quarré les
Tombes
La collaboration
« Début janvier 1944, c’est à la
suite d’une dénonciation par un milicien que
le maquis d’Aubin alias « Bernard » installé en
forêt de Breuil près de Saint-Brisson (Nièvre)
et comptant 53 hommes doit se scinder en petits groupes
en principe moins vulnérables.
Six hommes, restant en contact avec « Bernard » installent
leur petit maquis dans une grande abandonné en Mont
(forêt de Quarré). Ils sont armés d’un
FM, de mousquetons et de pistolets. Nous trouvons là Maurice
Blin, Lucien Charlot, Lucien Dion, Serge Girard, André Halck,
Roger Loriot.
Cinq de ces maquisards seront exécutés à la
suite de l’acharnement du milicien dénonciateur
du maquis de Saint-Brisson et qui a gardé le groupe
réfugié sur le territoire de Quarré dans
son collimateur.
C’est d’abord Serge Girard qui est arrêté en
mission. Le maquis prévenue abandonne précipitamment
la grange pour faire une cabane plus loin, dans un endroit
semblant plus en sécurité. Hélas,
le milicien l’a repéré et il est vite
cerné par les soldats hitlériens. Blin, Dion
et Halck sont faits prisonniers. Loriot n’est pas
et Charlot a réussi à s’enfuir. Il
se cache et voit passer ses compagnons entourés
des SS accompagnés du milicien. Charlot se dirige
alors sur le Jarnois l’un des hameaux de Saint-Agnan
où demeure la grand-Mère de Roger Loriot.
Il retrouve celui ci ainsi que d’autres camarades
du grand maquis initial. Mais le milicien a suivi la piste
de Roger Loriot. Le Jarnois est cerné. Roger Loriot
découvert est massacré sur place. Encore
une fois Lucien Charlot parvient à s’échapper.
Serge Girard, Maurice Blin, Lucien Dion et André Halck
transférés à la prison d’Auxerre
seront fusillés au champ de tir d’Egriselles
Venoy le 145 mars 1944.
Lucien le miraculé, seul rescapé du
groupe de la grande en Mont traverse Saint Agnan et là,
par hasard, trouve la filière pour rejoindre le
maquis Vauban à la Chapelle Saint Pierre.
Ce secteur de Quarré - Saint Léger est à la
fois un lieu actif de résistance et un dangereux
repaire d’espions, celui-ci centré sur le
hameau de Ruères (Saint-Léger). Mais un rapide
historique fera mieux comprendre cette affaire.
Lorsque le 16 juin 1940 les Allemands arrivèrent à Saint
Léger Vauban, les officiers estafettes motocyclistes
réclamèrent le Moulin de Ruères demeure
des époux K…Victor et Valérie. Puis
ce fut pendant trois ans un défilé des officiers
nazis dans cette « pension de famille »,
séjour agrémenté par des filles recrutées
comme cette Georgette P…entrée ensuite aux
bureaux de la LVF rue du Temple à Auxerre ;
celle-ci ainsi que sa mère dénoncent en 1942
les patriotes de Saint-Léger-Vauban soupçonnés
de résistance. Le père était décédé.
C’était un instituteur retraité que
j’avais bien connu avant la guerre et je crois qu’il
n’aurait pas été fier de la nouvelle
orientation de sa famille.
Maria Valtat, pionnière de la Résistance
en ce Bas-Morvan, avait franchi sans dommages les bourrasques
d’avril 1942. « Gaston » ne
l’avait pas dénoncée (elle l’avait
soigné et il en eut sans doute de la reconnaissance).
Le 14 juin de cette même année 1942 elle célébrait à Saint-Léger-Vauban
le mariage de son fils Marcel (son mari étant toujours
interné) quand arrivèrent trois officiers
allemands. Gros émoi. Mais celui qui commandait
n’arrête personne ; il se contente d’une
mise en garde et n’hésite pas à donner
le nom de la dénonciatrice : la veuve P…Quelques
jours après Maria Valtat par mesure de sécurité décide
de partir dans la clandestinité.
A la « pension de famille » de Ruères
on proteste de son patriotisme mais en Décembre
c’est le monastère de la Pierre qui Vire qui à son
tour est dénoncé. Il y a encore un doute.
Par deux fois, les hommes du groupe Vauban viennent visiter
le Moulin de Ruères, mais, après avoir interrogé les époux
K… leur donnent simplement un avertissement.
Le 25 janvier 1944 les époux K…quittent brusquement
leur « pension de famille » pour
s’installer à Auxerre au bar « Pierre »,
rue du Temple, rendez-vous des collabos, où ils établissent
leur quartier général. Un drame est dans
l’air. De nombreux réfractaires au STO se
sont réfugiés dans le secteur de Quarré ;
le 2 février 1944 à 7h30 un car monté par
25 hitlériens avec 2 miliciens commandant la manœuvre
arrive à Ruères et stoppe devant le café Marie
Brizard. En quelques secondes la maison est cernée ;
toute la famille Brizard est arrêtée sur le
champ.
Effectivement le café Brizard est une planque des
chefs clandestins. Il a ravitaillé et hébergé le
groupe Vauban. Cela se sait. Le patron Marie Brizard dirige
de plus une entreprise locale.
Les deux miliciens qui commandent la manœuvre sont
des hommes de Marcel Bucard sous les ordres de Fichter
agent de la gestapo à Paris et frère de Valérie
K…, la véritable organisatrice de l’expédition.
Le soir le car partait emmenant une vingtaine de personnes
de Saint-Léger-Vauban.
Quelques jours après les arrestations du 2 février
les époux K… reviennent à Ruères
sous escorte de soldats allemands. La résistance
a incendié leur domaine (note de l’auteur :
les époux K… ne furent pas condamnés
après la libération et reçurent au
contraire une fabuleuse indemnité pour l’incendie
de leur domaine, soit 7.5000.000 F en 1955). L’autre
café dont le patron fait de la propagande envers
l’occupant leur servira de refuge provisoire. Ils
y retrouvent P. W, sujet suisse, électricien et
cultivateur mais aussi grand admirateur du sinistre Adolf.
Pendant une quinzaine de jours ce fut la terreur dans
tout le secteur. Hitlériens et Francistes épuraient.
Mais quelqu’un était passé à travers
les mailles du filet, justement celui qu’on cherchait
qui depuis 10 ans travaillait pour Brizard, dénoncé comme
un dangereux « terroriste » :
Armand Simonnot, dit Théo qui prudemment a rejoint
le « Vauban » à la Chapelle
St Pierre.
Le bilan se solde par plusieurs déportations dont
les époux Brizard et René Rimbert de St Léger
qui devait succomber à Dora en février 1945.
Les autres personnes arrêtées furent relâchées
après plusieurs mois de prison.
Le maquis Vauban a réagi. Un commando s’empare
de nuit du milicien franciste habitant une maison isolée
et dont l’activité a été à la
base des recherches de l’ennemi dans tout le secteur.
Le prisonnier est amené au maquis. Il passe aussitôt
aux aveux dans une attitude de provocation. Il est condamné à mort
et exécuté.
Cela amène une recrudescence de la répression
dans tout le Bas-Morvan, qui est donc loin d’être
pour le maquis Vauban le havre de repos et d’oubli
rêvé par le « Père Robert ».
Ainsi Hitlériens et miliciens envahissent à nouveau
le monastère de la Pierre qui Vire . Perquisition
en règle. Par une chance étonnante plusieurs
personnalités réfugiées momentanément à l’abbaye
(dont le directeur parisien de la SNCF) ne sont pas inquiétées,
mais un moine est arrêté ainsi qu’un
jeune hôte civil . Cela n’aura pas de
suite grave.
Les dénonciateurs continuent à sévir
un peu partout et à provoquer de nombreuses arrestations.
A Auxerre, René Schaeffer, le patron du café « A
la Grappe d’Or » à côté de
la poste, est arrêté. C’est un Alsacien,
patriote intraitable qui ne minimise en rien ses convictions
dans les interrogatoires. Il sera déporté et
mourra à son retour de déportation.
Une femme G… de la commune de Lucy le Bois, ayant
besoin d’argent eut l’idée d’aller
dénoncer Etienne Delarue, boulanger qui ravitaillait
régulièrement la Résistance et les
allées et venues de jeunes ne passaient pas inaperçues.
Quand les hitlériens vinrent en force pour arrêter
le boulanger et se présentèrent à sa
porte, il y avait cinq maquisards dans la cuisine. Pour
leur laisser le temps de se sauveur derrière par
la cour, le patron fit semblant de ne pouvoir ouvrir. C’est
alors que les Allemands impatientés tirèrent à bout
portant à travers la porte tuant net le malheureux.
Puis une grenade fut jetée dans la cuisine blessant
un des fils au bras et une jeune femme, la bonne sans doute,
aux jambes. Les maquisards ainsi que Gilbert l’autre
fils, se sauvèrent dans la Citroën B2 du boulanger.
Quant à la dénonciatrice, elle fut appréhendée,
jugée, condamnée à mort et exécutée
aux Iles Ménéfriers, Gilbert Delarue ayant
rejoint le maquis Verneuil »
Source : L’occupation hitlérienne et la résistance
dans l’Yonne (Robert BAILLY)
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